Une Science que ne peuvent contenir les livres

بسم الله الرحمن الرحيم
و الصلاة و السلام على أشرف المرسلين
و على اله و اصحابه أجمعين

Une Science que ne peuvent contenir les livres

Résumé de l’assise du 22 Juin 2018 / Jumu’a 8 Chawwâl 1439 [Partie 2] :

[…] Attention, le kachf, ne renvoie pas à une aptitude qui te permettrait de savoir ce que fait l’individu chez lui quand personne ne le voit ! Non, le kachf consiste en le fait de connaître les Lois du Seigneur ﷻ dans le néant qu’est le monde dans lequel nous vivons. Si tu saisis la Loi divine régissant ce néant, tu atteindras le dévoilement, tu atteindras les sens profonds et ésotériques… c’est cela qui te sera utile, au Jour dernier !

Ce Jour-là, il ne te sera d’absolument aucune utilité de savoir ce qu’untel ou untel a pu faire, ou d’être capable de lire dans les pensées des uns et des autres… tu ne seras pas questionné sur cela ! Plutôt, tu seras questionné sur cette Loi : as-tu fais preuve d’équité dans ton cheminement, t’es-tu fidèlement conformé au suivi du Prophèteﷺ  ? Le Messager d’Allâh ﷺ nous dit en ce sens dans un Hadîth : « Voici la Voie d’Allâh, suivez-la donc, et ne suivez pas les sentiers (qui s’en écartent) [1]. » Voilà ce sur quoi tu seras questionné au Jour du Jugement. C’est donc là que se trouve la science du dévoilement, par laquelle le voile est levé, de sorte que t’apparaisse la marque du Créateur fluant en chaque chose, et que tu sois de cela un témoin oculaire concret.

Cela aura pour effet de renforcer ta foi, ta certitude et ton attachement à la religion, ou plutôt à la quintessence de la religion, à l’esprit de la religion, à la saveur de la religion… tu accompliras alors la prière, le jeûne, et toutes tes adorations en savourant chacune d’entre elles. En apparence, tu ne feras rien de plus ni rien de moins qu’un simple musulman… mais tu seras supérieur à cet individu normal par la Science, c’est-à-dire lorsque se dévoilera à toi la véritable saveur de cette adoration.

Dès lors, quand sonnera l’heure d’accomplir la prière, tu ne te lèveras pas avec paresse et nonchalance. Ce ne sera pas un poids sur ton cœur. Au contraire, ce sera pour toi une source de Proximité et de revivification. De ce fait, si tu constates que dans ton cœur il y a une lourdeur dans l’accomplissement des adorations, une lourdeur dans l’accomplissement de ton wird, de la prière ou du jeûne… alors sache qu’il te faut revenir à l’étude de la réalité de ton cœur, et que tu dois revenir à l’imploration du Pardon divin (istighfâr), afin que tes troubles s’estompent et que la rouille qui a affecté ton cœur disparaisse.

Si tu avais véritablement goûté à la saveur de l’adoration, le voile t’aurait été levé. Ne viens pas prétendre à être de ceux dont le voile a été levé, alors que tu fais preuve de paresse dans tes adorations ! Ceux dont le voile a été levé, ce sont toujours les premiers dans l’adoration du Seigneur ﷻ. Cette expérience mystique du dévoilement est une expérience accessible par la certitude (yaqîn), par l’Amour, et par l’établissement ferme et définitif du miroir du cœur, après qu’il ait été dûment poli et dépouillé de tous ses penchants vers les futilités de ce bas-monde. Car comme nous l’enseigne sayiduna al-Mustafa ﷺ, les cœurs rouillent comme le fer lorsqu’il est touché par l’eau, et c’est par le dhikr d’Allâh qu’on les polit.
Pourquoi par le dhikr d’Allâh ?
Tout simplement parce que la cause de la rouille des cœurs, c’est leur insouciance. L’absence de dhikr entraîne l’insouciance et le penchant vers les passions de la nafs, donc un état d’éloignement.

Il y en a ainsi certains pour qui les assises de dhikr sont lourdes. Qu’est-ce que cela veut dire ? …que ton cœur est rouillé ! Quand bien même tu viendrais nous dire que tu vois monts et merveilles, que tu as des visions incroyables et extraordinaires… on ne peut pas te croire, tu n’es pas fiable, car lorsque tu es assis avec nous, tu n’es pas présent.

C’est toujours le corps qui traduit l’état du cœur. Ta langue, tes membres… si ta langue est insouciante, et si tes membres sont insouciants… cesse de te mentir à toi-même, cesse de dire « Moi je, moi je, moi je, moi je… » Impossible !
Si ton état intérieur était vraiment celui que tu prétends qu’il est, il se serait manifesté de manière apparente sur ton corps. C’est comme si ton intérieur, ou ton cœur, était un livre… dont ton corps extérieur en serait la couverture. Le titre de ce livre, c’est toi.

Comme le dit sayiduna ‘Ali (karramAllâhu wajhah) : « Si le ‘arif parle, nous le cernons dans l’heure. Et s’il ne parle pas, nous le cernons dans la journée. » Parce que ta langue dévoile tout de toi, de sorte que lorsque tu t’exprimes, tu n’exprimes rien d’autre que ce qu’il y a en toi. Même si tu donnes des exemples destinés à autrui… tu ne touches en vérité à nul autre qu’à ton propre cœur. Si se diffuse de toi une parole éminemment élevée et céleste, alors sache que ton cœur a effectivement transpercé le voile. Et si au contraire ta parole est vile et honteuse, sache que tu es empêtré et submergé par les ténèbres. Les mots que tu emploies pour t’exprimer, même s’ils ne sont pas forcément d’un degré élevés dans la langue arabe, ce sont tout de même des termes chargés d’Imân, pleins de adab, de khouchoû’, d’apaisement, de tranquillité… telle est la langue du croyant. Si au contraire ta langue n’est que rires, amusements et grossièretés, alors il nous est impossible de dire de toi que tu as un cœur maîtrisé et fermement établi dans la Présence divine.

Telles sont les sciences qui ne sauraient être consignées dans les livres. C’est-à-dire ce kachf, ce dévoilement, les livres ne peuvent le contenir. Même s’ils peuvent en parler, exprimer des thèmes spirituels, on ne rentre jamais vraiment dans le vif du sujet. Parce que l’auteur a toujours peur… un livre, n’importe qui peut le lire : aussi bien celui à qui il est destiné que celui qui n’en est pas digne ou n’a pas encore atteint le degré spirituel requis. Ces sciences ne sont évoquées et divulguées qu’à des gens bien spécifiques, parce qu’il s’agit de sciences divines et cachées, au sujet desquelles sayiduna al-Mustafa ﷺ, dit :
« Il y a dans la Science un aspect caché (maknoûn) que ne connaissent que les savants par Allâh : s’ils venaient à en parler, ne le renieraient que les gens insouciants d’Allâh. Ne méprisez donc aucun d’entre les savants à qui Allâh a octroyé une Science venant de Lui, car à partir du moment où Allâh la lui a octroyée (cette Science), c’est qu’Il ne l’a pas méprisé [2]. »

Pour nous la considération du degré de science d’une personne est en fonction de ses diplômes. Si tu as un diplôme, alors bienvenue… seulement cette Science dont il est ici question, il t’est impossible d’en obtenir quelque diplôme que ce soit ! Tu ne vas pas devenir docteur, ou professeur dans cette filière… parce que ce n’est pas comme cela qu’on l’acquiert. C’est ainsi en raison de leur non obtention de diplômes reconnus, que les gens d’Allâh ont souvent été reniés et méprisés par les autres. Evidemment, personne ne peut leur donner de certificat ! Seul Allâh ﷻ leur donne une tazkiya ! « C’est plutôt Allâh qui purifie (yuzakki) qui Il veut [3] ! »

Si le Seigneur ﷻ avait méprisé et mésestimé ce serviteur, jamais Il ne lui aurait octroyé cette Science, jamais Il n’aurait dévoilé sa vue intérieure afin que se révèlent à lui toutes ces choses, de visu ! Il ne te convient donc pas à toi, qui que tu sois et quel que soit le degré que tu aies atteint dans la science exotérique, de mépriser, dénigrer ou rabaisser un tel homme.

Cette Science englobe la connaissance de ce qui relève de l’inconnaissable (ghayb), au travers de la vision, par l’œil de la certitude, dissipant définitivement la moindre trace de doute. Ne demeure alors sur le sujet plus aucune place au débat, ni à la divergence quelle qu’elle soit : ne subsiste que la Vérité pure et essentielle. Il n’y a plus de place pour la discussion, ne serait-ce qu’avec toi-même, car lorsque la Haqîqa se révèle à toi, tout ton être s’apaise et se conforme à ce que requiert de lui le cheminement spirituel.


[1] Rapporté par Ahmad.
[2] Rapporté par Abou ‘Abderrahmân al-Sulmiy dans al-arba’în. Hadîth mentionné par al-Ghazali dans ses ouvrages.
[3] Sourate al-Nisâ’, verset 49.

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